1a Je rêve à nouveau de la fabrication du livre. Pour superviser son impression, j’ai rendez-vous dans une école.
3a Fraîchement imprimées, les feuilles sont amenées dans une autre salle. Des carnets vierges à couverture toilée sont empilés sur les tables. Le titre du livre est inscrit en creux dans la toile (un « refoulage », dans le jargon de l’imprimerie).
3b Une stagiaire m’assiste dans le montage. Nous devons découper les images, une à une, les coller dans les carnets toilés, comme dans un album Pannini.
4a Notre premier exemplaire est un désastre. Tout est en désordre. C’est un peu comme les crêpes, nous disons nous, la première est toujours ratée.
5a Je le rejoins. Je lui dis : le transporteur arrive dans trois jours. Notre diffuseur à Paris doit commencer son travail. On est très en retard. Mon collègue a l’air absent. Il ne se rend pas compte ou il s’en fiche. Je le presse. On doit encore fabriquer mille exemplaires !
5b Son détachement m’effraye. Je lui reproche sa désinvolture. Je l’engueule. Il conserve son calme, stoïque. Je m’emporte. On laisse tomber pour aujourd’hui ! Je lui donne rendez-vous dans deux jours, pour terminer tous ces collages.
6a Je lui dis de m’attendre, qu’il ne se rend pas compte, qu’il doit au moins voir le premier exemplaire, fabriqué avec la stagiaire. Je rentre dans l’école, à la recherche du premier livre martyr.
6b Si je lui montre cet exemplaire, mon collègue éditeur devrait enfin partager mon angoisse, avoir un sursaut de bon sens, et se mettre au travail. Je me dis ça sans trop d’espoir. L’école est vaste. Je ne la connais pas. Je me perds dans le labyrinthe des corridors et des escaliers.
8a Un professeur m’interpelle grossièrement. Il me parle en anglais. Il me reproche de l’avoir humilié devant ses élèves. Comme je ne vois pas de quoi il parle, il m’insulte de plus belle. Je le quitte précipitamment.